Le bois source d’énergie
Le bois a été très tôt utilisé pour la fabrication du fer dans les bas fourneaux. Mais pour augmenter son pouvoir énergétique et améliorer la qualité du fer, on s’est mis à utiliser du charbon de bois disposé dans le haut fourneau sous forme de couches alternées avec le minerai.
Le fer obtenu était plus pur et la réduction plus rapide, car le charbon de bois donne plus de chaleur, résiste à l’écrasement, permettant ainsi à l’air de circuler dans le haut fourneau et participe aux réactions chimiques de réduction du minerai de fer en fonte.
Un nouveau métier s’est alors développé : celui de charbonnier vivant en famille au fond des bois, conduisant son train de meules afin de fournir le combustible des fourneaux locaux de plus en plus nombreux et de plus en plus hauts.
1 MILLION DE STÈRES DE BOIS PAR AN !
Ainsi, au fil des siècles, retrouve-t-on les charbonniers haut-marnais alimentant plus de 200 usines dans 150 villages portant la production de fonte au bois à la première place du pays. En 1854, la fabrication des 76 000 tonnes de fonte au bois produites en Haute-Marne a nécessité 1 million de stères de bois !
LE CHARBON DE BOIS
Le charbon de bois provient de la cuisson en air raréfié, à l’étouffée, de bois de taillis de 20 ans qu’on appelle “la charbonnette”.
Cette carbonisation lente élimine l’eau, les nombreux composés pyroligneux comme les goudrons contenus dans le bois, ne laissant que du carbone (79% environ), des matières volatiles (14%) et des cendres (7%). Le pouvoir calorifique du charbon de bois est de 7000 calories contre 3600 au bois sec, 2800 au bois ordinaire, 7500 à la houille moyenne et 6000 au coke.
Le charbon de bois, on le voit, n’est guère inférieur au coke, si ce n’est par la difficulté à l’obtenir (le travail du charbonnier est délicat) et par la pénurie de taillis qui interdisait d’aller au delà des quantités produites.
UN TRAVAIL COMPLEXE
Le charbonnier possède une technique, des outils, un vocabulaire propres à son métier. Le savoir-faire est fondamental, depuis le choix du bois jusqu’à la carbonisation exacte de celui-ci en passant par la propagation du feu, tour à tour, attisé et maîtrisé.
1
Choisir l’emplacement : pas trop venté car trop d’air signifie une combustion trop rapide et donc manquée. Facile d’accès aux charrois
2
Choisir le bois : les bois durs donnent les meilleurs résultats :
chêne : 0,250 pour 1 unité 20 à 24 kg à l’hectolitre
hêtre : 0,210 25 à 28 “ “
charme : 0,185 22 à 24 ” “
peuplier : 0,182 14 à 18 “ “
bouleau : 0,168.
3
Préparer le sol de la meule en construisant la “faulde” sur laquelle il dressera sa meule de charbonnette autour d’un piquet central. Le sol est un mélange de terre et de fraisil (ou faisin) composé de poussier de charbon et de terre brûlée.
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Dresser la meule selon des dispositions très précises : les bûches sont placées en rayons dirigés vers le centre.
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Recouvrir la meule de faisin, d’herbe de mousses pour permettre une cuisson à l’étouffée.
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Mettre à feu en introduisant des braises incandescentes dans l’orifice laissé libre par l’enlèvement du piquet central.
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Faire propager le feu dans toute la meule qui est surveillée pendant quatre jours et quatre nuits, le charbonnier habitant près de son train de meules. Avec des claies qui entourent la meule, on freine les vents trop forts.
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Repos de 24 heures et découverte de la meule.
Le charbon de bois doit sonner comme du cristal.
Les meules mesurent entre 4 et 8 mètres avec 40 à 60 stères de bois. On a pu aller jusqu’à 14 mètres avec 100 à 150 stères.
On a tenté de moderniser la technique de combustion du charbon de bois : des essais ont été faits, mais ils n’ont pas été poussés plus avant car le coke a remplacé le charbon de bois au cours du XIX° siècle de façon irréversible : moins cher, abondant et donc pouvant répondre aux besoins d’une production sidérurgique massive, où les tonnages ne s’exprimaient plus en milliers de tonnes, mais en millions…
L’ASPM a reconstitué la fabrication du charbon de bois en décembre 1993 dans la forêt de Ville-en-Blaisois.