S = Soufflerie à piston

Les images de l’Encyclopédie nous ont toujours habitués à voir ces grands soufflets de bois, tels que la forge de Buffon les a reconstitués. Or, à partir des années 1820, cette technique tombe en désuétude et est remplacée par des souffleries à pistons, boîtes à vent avec ou sans régulateur d’air.

Les souffleries à piston

A Dommartin-le-Franc qui a adopté cette technologie vers les années 1840, s’il y a reconstitution de machineries, c’est cette solution qui devrait être mise en avant, car elle représente le progrès du XIX° siècle avec la récupération de l’air chaud (voir Fontes n° 1 et 6bis) et l’introduction du coke. L’inventaire de 1848 nous décrit en effet une soufflerie constituée d’une roue à trois anneaux et à augets. Au bout de l’arbre de la roue, un engrenage en fonte commande un autre engrenage plus grand placé sur l’arbre à cames de la soufflerie principale. Sa description n’est pas très claire : on évoque deux caisses en peuplier, des “fouloirs” qui sont les pistons, en fonte coulissant dans la caisse. L’inventaire étant une description de l’état et non des mécanismes, on a du mal à saisir le mode de fonctionnement précis d’une telle installation.
L’épais livre sur “la métallurgie comtoise”  nous donne à voir ce qu’étaient ces pistons, en bois ou en fonte.
Les soufflets de cuir analogues à ceux de nos cheminées d’antan avaient été remplacés par des systèmes en bois dès le début du XVIII° siècle. Pour expliquer cette nouvelle mutation, il faut rappeler les défauts des systèmes à soufflet : l’air était injecté par à-coups et à chaque fois que le soufflet se regonflait, la pression tombait. On avait tenté de pallier cet inconvénient en mettant côte à côte deux soufflets, mais le rythme restait irrégulier. De plus, ils étaient encombrants et devaient être proches du fourneau puisque l’air était envoyé par une “buze”. En outre, leur entretien était complexe, les bois frottaient les uns contre les autres et beaucoup d’énergie était perdue en friction et fuites d’air par les jointures.


Enfin, l’emploi des appareils en bois était jugé “indigne d’une usine bien gérée”, écrivait le manuel de métallurgie de Flachat au milieu du XIX° siècle.
Les souffleries à pistons sont toujours actionnées par la roue hydraulique, mais les variantes sont nombreuses : à balancier, horizontales, verticales, à une ou plusieurs boîtes à vent, en bois ou à un ou deux cylindres de fonte…
Le plan de 1834 d’Autrey-lès-Gray (70) montre bien le système du balancier, alors que le dessin de Vy-le-Ferroux (70) en 1827 reste aux boîtes en bois classiques. Dans ce cas, les caisses sont en noyer, le fond en sapin, le tout est assemblé avec boulons et losanges en fer. Le principe est simple : on a soit un système simple avec deux boîtes qui remplacent les simples soufflets, soit un système à double effet, une paroi mobile va et vient à l’intérieur de la caisse et des clapets qui s’ouvrent et se ferment alternativement. (voir croquis).

Cette technique est née en Grande-Bretagne en 1770, arrive au Creusot en 1758, en Berry et Nivernais en 1795 et se répand lentement dans l’Est de la France avec une généralisation dans les années 1820-1830. Mais tout le monde n’est pas convaincu. Certains maîtres de forges passent aux boîtes à vent en bois, mais rechignent à adopter la fonte. Et quand l’usine passe au système “fonte”, elle garde les anciennes souffleries au cas où…

Extrait de l’article publié dans le numéro 15 de Fontes.


1 La métallurgie comtoise XV° – XIX° siècles – Étude du Val de Saône. Jean-François Belhoste, Christiane Claerr-Roussel, François Lassus, Michel Philippe, François Vion-Delphin.
Les cahiers du patrimoine 416 pages 390 F. ouvrage de référence, illustré, de première qualité édité par l’Inventaire général et l’ASPRODIC, association pour la promotion et le développement de l’inventaire comtois. 1994.

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