« Le métal est intemporel et s’impose comme matière écologique »
L’Ifram, distingué par le prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main 2019, dans la catégorie Parcours, promeut les métiers du métal en France et à l’étranger. Son directeur Stéphane Robert explique le rôle de cet institut.
L’Institut de formation et de recherche pour les artisanats des métaux (Ifram), installé à Villers-Ecalles, en Seine-Maritime, est lauréat du prix Parcours 2019. Il est né en 2001 du besoin des professionnels de fédérer le secteur.
Qu’avez-vous choisi de montrer au public dans l’exposition du Palais de Tokyo ?
L’Ifram propose des formations très spécifiques qui n’existent pas ou très peu ailleurs. L’exposition présentera surtout le repoussage, qui consiste à donner une forme voulue à une feuille de métal, à l’aide d’outils et de contre-formes. Cette technique est très utilisée dans l’ornementation pour réaliser, entre autres, des feuilles d’acanthe ou des fleurs de lys. Toutes les ornementations des grilles du château de Versailles sont faites de cette façon. Nous proposons également des formations de débillardage – consistant à donner à une rampe la courbure de l’escalier –, de coloration des patines et de dinanderie, soit la mise en forme d’ustensiles de cuisine ou de vases au moyen de différents outils, principalement les marteaux.
Qui sont ces artisans que vous fédérez ?
Forgerons, serruriers, couteliers, maréchaux-ferrants, taillandiers, fondeurs d’art… Leurs profils sont divers, mais ils ont tous en commun cette passion du métal. Beaucoup s’imaginent qu’il s’agit d’un monde exclusivement masculin, mais cela change et on trouve aujourd’hui de plus en plus de femmes dans les ateliers. Elles apportent une approche et une sensibilité différentes par rapport à la matière.
Pour défendre la diversité de ces savoir-faire, l’Ifram rayonne au niveau national et entretient aussi des relations avec ses alter ego européens et internationaux. Le travail du métal remonte à l’âge du fer, et depuis il n’a cessé d’accompagner l’évolution humaine. Ses caractéristiques techniques permettent de créer une large variété d’objets, du portail au mobilier, de la vaisselle aux bijoux, des cloches d’église aux canifs de poche. Le métal est intemporel et, aujourd’hui, dans un monde fragilisé, il s’impose comme une matière écologique, puisque recyclable à l’infini.
Sur votre site Internet, vous appelez aux dons afin de « sauver l’Ifram ». Ce prix Parcours vient donc à point nommé…
Effectivement, ces deux dernières années ont été difficiles pour l’Ifram, comme pour toutes les associations. Des suppressions de subventions nous ont poussés à revoir notre modèle économique. Cela nous a obligés à suspendre temporairement certaines activités comme l’organisation de salons et la publication de notre magazine, le bien nommé Fèvres (du latin faber, désignant l’ouvrixer travaillant le fer). Nous avons, depuis quelques mois, sorti la tête de l’eau, mais la route est encore longue avant de pouvoir relancer pleinement toutes nos activités.
Le prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main va nous permettre de gagner plusieurs années et de relancer très rapidement les activités suspendues. Nous reprenons la publication de notre magazine à partir d’avril 2020. Nos abonnés attendent cela avec impatience, et nous travaillons avec la Fondation Bettencourt Schueller à l’organisation du prochain salon européen Les Fèvres pour 2021, qui coïncidera avec une fête anniversaire : les 20 ans de l’Ifram.
Cet article fait partie d’un dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la Fondation Bettencourt Schueller.